PENSER AUX DERNIERS HARICOTS
C’est l’histoire d’une maison et d’un jardin. L’histoire d’un grand cerisier au goût chaud, noir et sucré. Plus loin, de la rhubarbe, cassée à la main dans un bruit creux, puis pelée et trempée dans une soucoupe de sucre en poudre. Aussi des groseilliers chargés de bijoux rouges et acides, tombant comme des boucles d’oreille, du cassis, des groseilles à maquereaux marbrées telles des billes de verre. Dans le fond, près du mur, de l’oseille, verte, astringente, surprenante. Autrefois dans un angle, des petites pommes, à jamais figées dans le souvenir d’une chair dure et acide.
Chaque recoin, l’occasion de croquer et de découvrir, curieux, gourmand, présent. Un terrain d’exploration gustative, d’apprentissage, de façonnage. Le plaisir infini de goûter chaque fruit, chaque herbe, chaque légume, cru, au sortir de la terre, même vert, comme on goûte un vin à toutes ses étapes, pour entendre d’où il vient et imaginer où il va.
Et au centre, parfois à l’ombre des grands marronniers, il y a le potager de maman. Maman qui retourne, qui bêche, qui sème, qui repique, qui arrache, qui récolte. Maman qui cuisine, qui partage, qui me garnit les bras de courgettes, de potirons, de salades, de radis,… Cette fois c’est un beau panier de haricots verts et de haricots beurre. Et tout à coup, me voilà cueilli par l’évidence : ce seront les derniers, les tout derniers. La maison sera bientôt mise en vente, le jardin aussi.
Aujourd’hui encore, la descente au potager fut l’occasion de froisser quelques feuilles de la main : livèche, sauge, thym, romarin et d’en humer les parfums. Et demain… demain, je compte bien sur les mêmes gestes, les mêmes senteurs et saveurs pour me ramener à tout instant dans ce jardin, mon jardin.
Bon je sais, on ne vous la fait pas ! Derrière cet intitulé chichiteux, se cachent bien les ingrédients de la salade liégeoise.
Je dois vous avouer que face à des haricots frais, c’est la première recette qui me vient à l’esprit. Entre les haricots légèrement croquants, la gourmandise du lard et des oignons confits, entre la rondeur, le liant de la pomme de terre et le peps du vinaigre et du persil plat, tout y est. D’habitude, je mélange le tout, servi tiède dans un grand saladier, mais bon, là, il fallait faire honneur, version Deluxe de circonstance.
Pour 4 personnes :
500 g de lard de poitrine nature (sans cartilage)
environ 20 haricots frais
2 pommes de terre à chair ferme
2 pommes de terre farineuses (bintjes)
4 oignons grelots
2 gousses d’ail
persil plat
huile olive
huile de noix
vinaigre de cidre
vinaigre balsamique
beurre
Lard de poitrine
Cuire la poitrine de porc sous vide à 60°C durant 36 heures. Refroidir rapidement dans de l’eau avec des glaçons. Couper des tranches (1 par personne) d’environ 8 mm d’épaisseur. Une trancheuse est idéale pour un résultat régulier. Fumer à froid durant 30 minutes. Réserver dans le récipient de fumage.Condiment à l’huile de noix
Peler et couper les pommes de terre farineuses en petits morceaux. Couvrir d’eau, saler et porter à ébullition. Cuire jusqu’à ce que la chair se défasse. Égoutter. Écraser à la fourchette. Assaisonner d’huile de noix, de vinaigre de cidre, de persil plat haché, de sel et de poivre. Le but de ce condiment est de rappeler le liant naturel des pommes de terre lorsque le tout est mélangé dans un saladier.Oignons grelots et ail confits
Éplucher. Couper les oignons grelots en deux et les gousses d’ail en quatre. Confire doucement dans de l’huile d’olive à feu doux sans faire brûler. Réserver sans jeter l’huile.Pommes de terre fermes rissolées
Cuire les pommes de terre à la pelure dans de l’eau salée. Garder la chair ferme. Éplucher. Couper en fines tranches (une et demie par personne). Faire colorer dans un peu de beurre. En fin de coloration, ajouter les oignons et l’ail pour leur donner également un peu de couleur.Haricots
Cuire les haricots à la vapeur. Les assaisonner de l’huile ayant servi à confire les oignons et l’ail, d’un peu de vinaigre de cidre, de sel et de poivre.Dressage
Retailler les tranches de lard pour qu’elles soient bien régulières. Faire chauffer une 1 cs d’huile d’olive et 8 cs de vinaigre balsamique. Laisser évaporer. Quand le vinaigre commence à caraméliser, colorer les tranches de part et d’autre. Dresser le condiment en plots à la poche à douille (ou en utilisant un sac de congélation dont vous découperez un coin).Disposer les différents éléments (haricots, oignons, ail, persil plat) en s’appuyant sur les plots de condiment. Essayer de dresser en volume.
Arroser d’un peu d’huile ayant servi à confire les oignons et l’ail.
Servir tiède.
Chapeau bas !
J’ai repartagé sur FB. Faut pas laisser dormir les belles choses !